Aéronautique : le plan de relance n’évitera pas les plans sociaux…

Aéronautique : le plan de relance n’évitera pas les plans sociaux…

L’été sera très “chaud” dans la filière aéro !

Lors d’une visioconférence organisée semaine dernière par l’association des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE), les responsables de la CFE-CGC Aéronautique-Espace-Défense ont indiqué que le plan de relance du gouvernement pour le secteur n’éviterait pas les plans de sauvegarde pour l’emploi ni les accords de performance collective.

Selon eux, l’été sera très “chaud” et des entreprises risquent de disparaître car le plan ne pourra pas aider toutes les entreprises.

Aussi important soit-il pour l’industrie aéronautique française, le plan de relance à “15 milliards d’euros” annoncé la semaine dernière par le gouvernement pour sauver ce secteur en crise n’évitera pas une grosse casse sociale. Lors de la présentation du plan de relance, le ministre des Finances Bruno Le Maire n’avait pas nié que la crise aurait un impact social, mais il avait expliqué que ce plan visait à “apporter un soutien massif au secteur pour, dans la mesure du possible, tout faire pour éviter les départs contraints”.

“Les annonces sont là. Elles correspondent à nos attentes (…) Mais nous ne croyons pas une seconde que les projets d’accords de performance collective (APC) et de plans sociaux seront jetés aux oubliettes”, expliquait vendredi Ludovic Andrevon, le président de laCFE-CGC AED (Aéronautique-Espace-Défense), lors l’une visioconférence avec l’Association des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE).

“Avec les plans sociaux et les risques de faillite de certaines PME et ETI, la période allant de fin juin à fin juillet s’annonce très compliquée”, a renchéri Françoise Vallinvice-présidente du syndicat qui représente 30% des voix dans le secteur aéronautique, ajoutant même que “certaines d’entre elles ne passeront pas l’été “, notamment celles qui étaient en difficulté avant la crise. En raison de la baisse de production d’avions, les difficultés ont déjà commencé.

Au même moment que les deux leaders de la CFE-CGC AEDs’exprimaient, Derichebourg Aeronautics Services, un sous-traitant toulousain d’Airbus signait un accord de réduction des salaires en contrepartie d’un engagement de ne pas procéder à des licenciements jusqu’en juin 2022. La direction prévoyait jusque-là de licencier 700 personnes. Toujours selon les deux syndicalistes, Daher devrait annoncer cette semaine un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

LES AIDES SERONT CIBLÉES

Plusieurs raisons justifient leurs craintes pour les prochaines semaines. La principale est liée aux choix d’allocation des aides du fonds de soutien financé par Airbus, Safran, Dassault, Thales et le futur gestionnaire de ce fonds qui doit être sélectionné après appel d’offres (500 millions d’euros au départ, un milliard à terme), lequel doit être opérationnel cet été pour pallier le risque de défaillances à court terme et prendre des participations majoritaires. Or, affirment Ludovic Andrevon et Françoise Vallin, tout le monde ne pourra être sauvé.

“Dans le plan de relance, il n’y en aura pas pour tout le monde”, pointe Françoise Valin. Pour elle, les “jeux sont faits”“Les grands donneurs d’ordre ont déjà acté les entreprises qui seront sauvées et celles qui ne le seront pas et qui disparaîtront au début de l’été.”

LES SOCIÉTÉS SPÉCIALISÉES DANS L’INGÉNIERIE “SONT EN PÉRIL”.

Pour Ludovic Andrevon, “les entreprises qui développent des produits seront sauvées car elles sont indispensables à la production des avions”. En revanche, les sociétés spécialisées dans l’ingénierie “sont en péril”. Car, avec la baisse d’activité, les donneurs d’ordre, réinternalisent des charges de travail.

Les difficultés des industriels et les menaces de disparition pourraient donc favoriser la consolidation du secteur, l’un des objectifs du plan de relance.

Les négociations entre la filière aéronautique et le gouvernement, sur la prise en charge du chômage partiel par l’État sur une longue durée (deux ans sont évoqués), pourraient permettre à certains industriels de limiter l’ampleur du plan social envisagé, voire de ne pas procéder à un plan social. Si un tel dispositif était mis en place, “certaines entreprises pourraient faire le pari de résister en évitant de lancer des plans sociaux, mais en lançant des plans de gains de productivité”explique Françoise Vallin, qui ajoute : “En revanche, les entreprises, qui savent déjà qu’elles en seront au même point dans deux ans après un tel procédé, mettront en place des PSE.”

Les sous-traitants ont l’œil rivé sur Airbus. L’avionneur a prévu d’annoncer un plan de départs d’ici à la fin juillet. Selon plusieurs sources, l’annonce était initialement prévue le 10  juin à l’occasion d’un comité européen, mais elle a été décalée avec l’annonce du plan de relance le 9 juin.

Pour certains, les annonces gouvernementales permettront d’atténuer l’impact du plan par rapport à ce qui était prévu. Jusque-là, il était question d’un plan de départs beaucoup plus lourd que le plan Power 8 en 2007-2008 (10.000 postes dont la moitié chez les fournisseurs), touchant en France, selon nos informations, la division avions d’Airbus, ATR et Stelia qui construit notamment le nez de certains avions. La presse britannique évoquait plus de 10.000 suppressions de postes au total.

PAS DE BAISSE SUPPLÉMENTAIRE DE LA PRODUCTION

Reste aujourd’hui à savoir ce qu’il en est après l’annonce du plan de relance qui prévoit un soutien aux ventes. En tout cas, après la baisse de production d’un tiers en avril, Airbus a décidé de ne pas la diminuer davantage. Quoi qu’il en soit, les conclusions de l’accord sur le chômage partiel seront déterminantes pour Airbus et l’ensemble de la filière.

Pour le cabinet de conseil Alix Partner, les entreprises doivent se redimensionner rapidement pour être en mesure de rebondir après 2022. « Il parait indispensable pour l’industrie aéronautique commerciale de se redimensionner, afin de s’adapter à une activité de plus faibles volumes pour assurer sa survie à court terme, à l’instar de l’industrie automobile en 2009 », a indiqué Alain Guillot, l’un des directeurs associés d’Alix Partners, lors d’une présentation d’une étude sur le secteur aéronautique la semaine dernière. “Les entreprises qui se redimensionneront rapidement et suffisamment seront plus compétitives et mieux armées pour le rebond futur”, a ajouté Pascal Fabre, un autre directeur associé. D’autant, précise Nicolas Beaugrand, également directeur associé, que la crise peut durer, selon les scénarios, entre trois et sept ans.

Article intégral de Fabrice Gliszczynski paru dans l’édition de LA TRIBUNE du 16.06.2020

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